D’importantes organisations de défense des droits de la personne et de la santé publique annoncent une plateforme nationale de décriminalisation des drogues pour le Canada

Le projet de loi présenté cette semaine par le gouvernement fédéral en vue d’abroger les peines minimales obligatoires et d’offrir des solutions de rechange aux poursuites pour la possession de drogues à des fins de consommation personnelle est un pas dans la bonne direction, mais il ne va pas assez loin.

Toronto, ON, 9 décembre 2021— Indignées après plus de 23000 décès liés à une intoxication aux drogues
depuis 2016, vingt-et-une organisations de la société civile de partout au pays, y compris des groupes de personnes utilisatrices de drogues, des familles touchées par l’usage de substances, des organisations de défense des politiques sur les drogues et des droits de la personne, des prestataires de services de première ligne et des chercheuses et chercheurs, ont collaboré à la publication du premier cadre stratégique canadien dirigé par la société civile pour la décriminalisation des drogues au Canada.

Réussir la décriminalisation : une voie vers des politiques sur les drogues basées sur les droits de la personne a pour but de mettre fin à la criminalisation néfaste et meurtrière des personnes utilisatrices de drogues — une pratique qui a entraîné des décès par surdose comme jamais auparavant dans notre pays. Ce projet vise également à protéger la santé et les droits de tous les Canadiens et Canadiennes.

«Aujourd’hui, nous lançons un appel national à l’action pour la décriminalisation des drogues, qui tombe à point. Cette voie vers des politiques sur les drogues basées sur les droits de la personne résulte de l’apport de nombreuses personnes qui utilisent des drogues; le modèle qu’elle présente est un point de départ important pour les décideurs politiques afin de décriminaliser et de réglementer les drogues actuellement illégales », a déclaré Natasha Touesnard, directrice générale de l’Association canadienne des personnes qui utilisent des drogues. «Seule une décriminalisation complète des drogues, permettant de fournir un approvisionnement sécuritaire, efficace et accessible, pourra nous amener vers la fin de l’épidémie dévastatrice de surdoses qui est en cours. » Cette plateforme détaillée est soutenue par plus de 100 organisations à travers le pays et appelle aux actions suivantes :

— La décriminalisation de toute possession de drogue pour usage personnel, ainsi que du
partage ou de la vente de drogue à des fins de subsistance, dans le but de couvrir les coûts
liés à l’usage personnel de drogues ou de fournir un approvisionnement plus sécuritaire, et
ce, en prenant les mesures suivantes :

  • Abroger l’article 4 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (LRCDAS) et l’article 8 de la Loi sur le cannabis;
  • Modifier l’article 5 de la LRCDAS, qui criminalise les infractions liées au trafic ;
  • Éliminer toutes sanctions et interventions liées à la possession simple de drogues ou au
  • trafic de subsistance;
  • Radier automatiquement les condamnations antérieures pour possession simple de drogues et pour la violation de promesses faites à la police, de conditions de mise en
  • liberté sous caution, de probation ou de libération conditionnelle liées à des accusations pour ces actes;
  • Définir des règles claires en ce qui concerne les cas où la police peut arrêter une personne, la fouiller et enquêter sur elle pour possession de drogues;
  • Retirer à la police et autres forces de l’ordre leur fonction de « garde», entre les personnes utilisatrices de drogues et les services sociaux et de santé, pour faire place à des organisations dirigées par des personnes utilisatrices de drogues ou des personnes qualifiées et formées œuvrant en première ligne.


— La redistribution des ressources allouées à l’application de la loi et au maintien de l’ordre vers des politiques, des programmes et des services non coercitifs et volontaires qui protègent et promeuvent la santé des personnes et leurs droits, notamment dans les sphères de la santé, de l’éducation, du logement et des services sociaux qui soutiennent les personnes utilisatrices de drogues. «Le partage d’expériences et d’expertises variées à travers le pays a permis de développer une vision commune de ce que devraient être les politiques en matière de drogues au Canada.

En optant pour cette plateforme de la société civile, le gouvernement fédéral a le pouvoir de réduire dès maintenant les préjudices associés à la criminalisation des personnes utilisatrices des drogues. Nous avons tous et toutes le droit au respect, à la sécurité, à l’accès aux soins de santé et aux services sociaux, et à une vie meilleure, sans jugement ni discrimination», a déclaré Sandhia Vadlamudy, directrice générale de l’Association des intervenants en dépendance du Québec (AIDQ).

— La prohibition des drogues visant à dissuader la consommation de drogues qui s'est déroulée sur plus d'un siècle a complètement échouée. La preuve la plus évidente de cet échec : les milliers de décès causés par l'intoxication par la drogue au Canada et la crise des surdoses qui se poursuit sans relâche. La prohibition est fondée sur le racisme, le sexisme et le colonialisme, et elle a renforcé ces pratiques. Elle a eu un impact disproportionné sur les personnes noires et les peuples autochtones, qui sont beaucoup plus susceptibles d’être arrêtés et sévèrement punis pour des infractions liées à la drogue.

« Les policiers perpétuent la guerre contre la drogue depuis plus d’un siècle. Ils vérifient les cartes d’identité, harcèlent, arrêtent, battent et incarcèrent les personnes qui consomment de la drogue, surtout si elles sont noires ou autochtones. Le moment est venu pour les policiers de rester à l’écart et de ne plus se mêler de nos vies. Ils ont causé tant de mal », a déclaré Garth Mullins, membre du Vancouver Area Network of Drug Users. « Ça en est assez avec les policiers, les tribunaux et les prisons pour les personnes utilisatrices de drogues. Finie l’occupation policière paramilitaire des communautés marginalisées. Voilà à quoi correspond une véritable décriminalisation. »

Les préjudices de la criminalisation affectent les personnes pour le reste de leur vie, car les casiers judiciaires limitent les possibilités d’emploi et de logement, affectent la garde des enfants et limitent les voyages, parmi d’autres conséquences. De plus, l’application des lois liées aux drogues coûte des milliards de dollars chaque année. « Nous finançons toujours le maintien de l’ordre et la répression alors que nous privons nos communautés de services qui s’attaquent réellement aux causes profondes du mal et de la violence. Nos prisons sont remplies de personnes qui ont besoin d’aide, pas d’un casier judiciaire», a déclaré El Jones, éducateur et activiste. « La stigmatisation liée à la consommation de drogue détruit des vies. Au lieu de financer une guerre contre la drogue, il est grand temps d’investir dans une vraie sécurité publique : le logement, la santé mentale, les soins aux enfants, et la possibilité de vivre dans une société sans oppression, pour toutes les personnes, même celles qui consomment de la drogue. »

Il est plus que temps d’opter pour des politiques audacieuses. La décriminalisation des personnes utilisatrices de drogues est nécessaire et constitue une étape importante dans la mise en œuvre d’une vision pour la politique en matière de drogues au Canada.

— 30 —

Contacts pour les médias :
Vanessa Nonat
AIDQ
communication@aidq.org
514-287-9625, poste 109

 

 

Citations additionnelles
« La guerre contre la drogue représente un échec monumental. Dans le cadre d’un régime de criminalisation, les personnes qui consomment de la drogue sont victimes de préjugés et de violations systématiques des droits de la personne et sont privées d’accès aux soins de santé essentiels, ce qui entraîne des infections et des décès évitables. Pour remédier à ces dommages, réussir la décriminalisation est primordial. Cette plateforme, qui reflète les voix de la communauté, en particulier celles des personnes les plus directement touchées par la prohibition des drogues, offre aux gouvernements une approche pour éliminer la menace étouffante de la criminalisation
dans la vie des personnes qui consomment de la drogue. » (Sandra Ka Hon Chu, codirectrice générale du Réseau juridique VIH)

« La guerre contre la drogue n’a pas seulement financé la police et rempli les prisons de ce pays, elle a eu des effets dévastateurs sur nos familles. En particulier, les mères noires et autochtones ont perdu leurs enfants dans le système de protection de l’enfance, entraînant un traumatisme générationnel. Les écoles, les hôpitaux et même nos maisons ont servi de lieux de violences policières ce qui n’ont rien fait pour traiter les traumatismes, pour guérir ou pour aider les personnes qui veulent recevoir un traitement pour leurs dépendances. » (El Jones, éducateur, journaliste et activiste)

« Réussir la décriminalisation offre un virage politique nécessaire depuis longtemps et constitue une première étape pour modifier une application du droit pénal cruelle et inadéquate qui a dévasté la vie d’innombrables Canadiens. Si elle est adoptée par le Canada, ce serait un pas important vers une approche humaine, fondée sur les droits de la personne et sur les données probantes, qui renforce les communautés pour tout le monde. » (Donald MacPherson, directeur général de la Coalition canadienne des politiques sur les drogues)

« Punir les personnes qui consomment des drogues représente une politique des drogues injustifiée qui entraîne une stigmatisation beaucoup plus néfaste que les drogues elles-mêmes. » (Jean-Sébastien Fallu, professeur agrégé à l’École de psychoéducation de l'Université de Montréal)

«Pilotée par des organisations nationales respectées et reconnues sur la scène internationale, la plateforme sur la décriminalisation des drogues s’impose désormais comme la pièce maîtresse devant servir aux actions à poser dès maintenant par nos gouvernements fédéral et provinciaux. Les principes qu’elle défend, les orientations qu’elle soutient constituent l’apport de la Société civile pour une incontournable réforme sociale dans le respect le plus entier des droits de la personne misant sur l’inclusion. » (Louis Letellier de St-Just, avocat en droit de la santé, président et co-fondateur de CACTUS Montréal et membre du conseil d’administration de l’AIDQ)

«Les politiques punitives à l’égard des substances psychoactives sont nées du racisme et du colonialisme, ayant à la fois échoué et causé des dommages catastrophiques. Les jeunes sont particulièrement stigmatisé·es et ciblé·es par ces politiques à cause de leur âge. Tandis que la décriminalisation semble être plus atteignable que jamais, il est primordial d’assurer que la voix des jeunes qui consomment des substances psychoactives demeure au centre de ces discussions. » (Kira London-Nadeau, présidente d'Étudiant.es canadien.nes pour les politiques éclairées sur les substances psychoactives)

«Ni malades, ni coupables, les personnes utilisatrices de drogues ne sont pas criminelles, la législation doit refléter la réalité. » (Chantal Montmorency, coordonnatrice générale de l'Association québécoise pour la promotion de la santé des personnes utilisatrices de drogues)

Les contributeurs à Réussir la décriminalisation : une voie vers des politiques sur les
drogues basées sur les droits de la personne

1. Association canadienne des personnes qui utilisent des drogues (ACPUD)
2. Association des infirmiers et infirmières en réduction des méfaits
3. Association des intervenants en dépendance du Québec (AIDQ)
4. Association québécoise pour la promotion de la santé des personnes utilisatrices de drogues (AQPSUD)
5. BC Association of Aboriginal Friendship Centres
6. BC Centre on Substance Use
7. British Columbia Civil Liberties Association
8. CACTUS Montréal
9. Coalition canadienne des politiques sur les drogues 
10. Étudiant.es canadien.nes pour les politiques éclairées sur les substances psychoactives
11. Cannabis Amnesty
12. Centre on Drug Policy Evaluation
13. Centre de recherche communautaire
14. Drug User Liberation Front
15. MAPS Canada
16. Moms Stop the Harm
17. Pivot Legal Society
18. Réseau juridique VIH
19. South Riverdale Community Health Centre
20. Thunderbird Partnership Foundation
21. Toronto Overdose Prevention Society

Endosseurs :
1. Action Canada pour la santé et les droits sexuels
2. Action hépatites Canada (AHC)
3. Africans in Partnership Against AIDS (APAA)
4. AIDS Committee of Durham Region (ACDR)
5. AIDS Committee of Newfoundland and Labrador (ACNL)
6. AlterHéros
7. Ally Centre of Cape Breton
8. ARCH Disability Law Centre
9. Association canadienne de santé publique
10. Association canadienne des infirmières et infirmiers en VIH/sida (ACIIS)
11. Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux (ACTS)
12. Association québécoise des centres d'intervention en dépendance (AQCID)
13. Avenue B Harm Reduction Inc.
14. AVI Health and Community Services
15. BC Humanist Association
16. Black Legal Action Centre
17. Black Lives Matter
18. Blood Ties Four Directions Centre
19. Breakaway Community Services
20. British Columbia Association of People on Opiate Maintenance (BCAPOM)
21. Butterfly (Asian and Migrant Sex Workers Support Network)
22. Canadian Students for Sensible Drug Policy (Vancouver Chapter)
23. Cape Breton Association of People Empowering Drug Users
24. CATIE
25. CAYR Community Connections
26. Centre associatif polyvalent d'aide hépatite C (CAPAHC)
27. Centre d'action pour la sécurité du revenu
28. Centre Walgwan
29. Clinique juridique communautaire de Hamilton
30. Clinique juridique communautaire de Niagara
31. Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida (COCQ-SIDA)
32. Coalition of Peers Dismantling the Drug War
33. Comité du SIDA de North Bay et de la région
34. Community Legal Assistance Sarnia
35. Direction 180
36. Dopamine
37. Dr. Peter AIDS Foundation (Dr. Peter Centre)
38. Drug User Advocacy League
39. EACH+EVERY: Businesses for Harm Reduction
40. École de travail social, Université du Québec à Montréal (UQÀM)
41. Élixir ou l'Assuétude d'Ève
42. ENSEMBLE Services Greater-Grand Moncton
43. Grassroots NB
44. Grenfell Ministries
45. Groupe de recherche d'intérêt public à McGill (GRIPQ-McGill)
46. Groupe de recherche et d’intervention psychosociale (GRIP)
47. Hamilton Social Medicine Response Team (HAMSMaRT)
48. HIV & AIDS Legal Clinic Ontario (HALCO)
49. HIV/AIDS Regional Services (HARS)
50. Hustle Heal Motivate
51. L’Oasis, unité mobile d'intervention
52. Le DISPENSAIRE centre de santé communautaire
53. Legal Clinic of Guelph and Wellington County
54. Les Bergers de L'Espoir
55. Logis Phare
56. Maggie's Toronto Sex Workers Action Project
57. Méta d'Âme
58. Mission Services of Hamilton Inc.
59. Niagara Area Moms Ending Stigma (NAMES)
60. Ontario Network of People who Use Drugs
61. Ottawa Inner City Health, Inc.
62. PACE Society, (Providing Advocacy, Counselling and Education)
63. PAN (Pacific AIDS Network)
64. Parkdale Queen West Community Health Centre
65. PASAN
66. Pavillon L'Essence Ciel
67. Peel Drug Users Network
68. PEERS Alliance
69. Peterborough Community Legal Centre
70. PHS Community Services Society
71. Point de repères
72. Point de Rue
73. Positive Living Niagara
74. Pozitive Pathways Community Services
75. Prisoners' Legal Services
76. Programme de recherche en partenariat (RÉ)SO 16-35
77. Projet L.U.N.E.
78. Réseau SOLIDARITÉ Itinérance du Québec
79. RÉZO, santé et mieux-être des hommes gais et bisexuels, cis et trans
80. Sex Professionals of Canada
81. Table des organismes communautaires montréalais de lutte contre le sida (TOMS)
82. The 519
83. Toronto Indigenous Harm Reduction
84. Toronto People With AIDS Foundation
85. Trans Pride Toronto, Transitioning Together
86. UBC Medicine Political Advocacy Committee
87. Union of British Columbia Indian Chiefs
88. Vancouver Area Network of Drug Users
89. West Coast LEAF
90. Women and HIV/AIDS Initiative (WHAI)
91. Yukon Status of Women Council

Retour à la liste des nouvelles

Notre infolettre

Restez à l’affût de l’actualité dans les domaines de la dépendance.